(Re)lire Médée

Lire :

Jean Anouilh, Médée, 1947, la petite vermillon, Editions La Table ronde, p. 40 (courte citation) 

Créon : Tu mens. J’ai tout examiné. Jason est innocent sans toi, séparée de la tienne, sa cause est défendable, toi seule t’es salie… Jason est de chez nous, le fils d’un de nos rois, sa jeunesse, comme bien d’autres, a peut-être été folle, c’est un homme à présent qui pense comme nous. Toi seule viens de loin, toi seule es étrangère ici avec tes maléfices et ta haine. Retourne vers ton Caucase, trouve un homme parmi ta race, un barbare comme toi ; et laisse-nous sous ce ciel de raison, au bord de cette mer égale, qui n’a que faire de ta passion désordonnée et de tes cris. »

Corneille, Médée, 1635, Théâtre II, Gallimard Flammarion, 2006, p. 150 (courte citation) 

Médée : (…) Jason me répudie! et qui l’aurait pu croire?

S’il a manqué d’amour, manque-t-il de mémoire?

Me peut-il bien quitter après tant de bienfaits?

M’ose-t-il bien quitter après tant de forfaits?

Sachant ce que je puis, ayant vu ce que j’ose,

Croit-il que m’offenser ce soit si peu de chose?

Quoi! mon père trahi, les éléments forcés,

D’un frère dans la mer les membres dispersés,

Lui font-ils présumer mon audace épuisée?

Lui font-ils présumer qu’à mon tour méprisée,

Ma rage contre lui n’ait par où s’assouvir,

Et que tout mon pouvoir se borne à le servir?

Tu t’abuses, Jason, je suis encor moi-même.

Tout ce qu’en ta faveur fit mon amour extrême,

Je le ferai par haine ; et je veux pour le moins

Qu’un forfait nous sépare, ainsi qu’il nous a joints ;

Que mon sanglant divorce, en meurtres, en carnage,

S’égaie aux premiers jours de notre mariage,

Et que notre union, que rompt ton changement,

Trouve une fin pareille à son commencement. »

Sénèque, Médée, Le Spectateur français, Imprimerie Nationale, traduction de Florence Dupont, 1997, p 75-76          (courte citation)

Médée : (…) Pourquoi hésiter? Courage
Suis ton premier mouvement
C’était le bon
Cette vengeance qui te réjouit n’est qu’un début
Il y aura d’autres épisodes
Ta fureur est encore de l’amour s’il te suffit que Jason ne se remarie pas
Invente un châtiment nouveau
Des tourments inouïs
Désormais prépare-toi à être toi-même
Viole tous les interdits
Débarrasse-toi de tout respect humain
On ne se fait pas justice en gardant les mains pures
Vautre-toi dans la colère
Tu dors, réveille-toi
Va chercher au fond de ta poitrine
Tes passions et tes violences de jadis
Tout ce que tu t’es permis jusqu’ici
Tu ne dois plus y voir qu’innocence et piété filiale
Va
Et que les hommes comprennent que tes crimes passés étaient peu de chose
Quelques petits services que tu rendais à d’autres
Tu ne sortais pas de l’humanité ordinaire
Ma douleur en était au prélude
Que pouvaient entreprendre de grand des mains sans expérience?
Que pouvait une fureur enfantine?
C’est maintenant que je suis Médée »

Ecouter : 

Maria Callas, 28 janvier 1970, à propos de son rôle dans Médée, de Pier Paolo Pasolini, archive INA : 

http://player.ina.fr/player/embed/CAF97063528/1/1b0bd203fbcd702f9bc9b10ac3d0fc21/560/315/1/148db8

Regarder : 

Timononaque de Byzance, Médée s’apprêtant à tuer ses enfants, fresque de Pompéi, 1er siècle avant JC, Musée archéologique de Naples : 

Eugène Delcaroix, Médée furieuse (1836-1838), Musée du Louvre :

http://www.louvre.fr/routes/eugene-delacroix

Frederick Sandys, Medea (1866-1868), Birmimgham Museums & Art Gallery : 

Aimé Morot, Médée (1876), Musée du Barrois : 

Sources : http://player.ina.fr ; http://cir.campania.beniculturali.it/museoarcheologiconazionale ; http://www.louvre.fr ; http://www.preraphaelites.org ; http://museebarrois.eklablog.fr ; image : eva monclus-baros